Mon âme avait été séparée de mon corps il y a de cela plusieurs années, néanmoins je continuais à errer sur les terres d'argents tel un fantôme, je divaguais à travers nos plaines et fus le témoin de nombreuses choses.
De la disparition des plus grands et puissants, des fleuves de sangs que firent couler mes redoutables frères lycans qui bien après ma mort, continuèrent à se gaver de victimes fraiches et innocentes.
Malgré cela, c’est avec peine que je constatais de jour en jour que notre influence et l’écrasante domination que nous avions imposée par le passé se rompait. Les terres d’argents s’étaient trouvées de nouveaux maitres.
Longtemps j'ai gardé espoir, un espoir désormais vain.
Bien que les épurations et les génocides qui eurent lieux avaient considérablement vidés les terres d'argents et raréfier celles-ci d'êtres vivants, la flamme qui brulait jadis en moi pour le chaos et la destruction s’était éteinte, les quelques cendres incandescentes n’avaient plus rien à consommer.
Le souvenir des cris d'horreurs et des lamentations des milliers de victimes que j'avais faites me submergèrent, toutes les guerres, tous mes adversaires étaient là, face à moi. Ils défilaient un à un, un peu comme un cérémonial en fait je ne savais pas vraiment ce qui se passait.
Le plus important pour moi, était bien évidemment d’avoir marqué ces terres de mon empreinte, et à jamais mon souvenir demeurera dans les esprits, comme l’un des plus féroce, cruel et terrifiant lycan que ces terres aient portées.
L’heure est venue pour moi de reposer en paix, de fermer les yeux sur un monde que jadis fut le mien, ces terres que j’ai foulées avec les plus grands… Bardal, Coroner, Eve, Luciole, Kodokan, Fuyutsuki, Hato et d'autres, tellement d'autres.
[…]
La douleur atroce qui m'extirpait de ce havre de paix était vive, par tous les dieux n'avais-je déjà pas assez souffert sous mon enveloppe mortelle? Qu'avaient-ils de nouveaux à me faire subir? Je ne comprenais pas, tout était noir autour de moi, transpercé par des éclairs rouges sang je restais là, comme prisonnier, incapable de bouger. La douleur se fit plus vive, je ne l'avais plus ressenti depuis des lustres, comment se pouvait-il? J'avais l'impression que mes organes fonctionnaient à nouveau. Une bouffée d'air, puis une seconde… Non! C'était impossible, que m'arrivait-il? Mon corps se mit à trembler, j'avais même l'impression de sentir faiblement mon cœur battre. Le sang affluait à nouveau dans mes veines, je ressentais un à un mes membres engourdit bouger.
Je comprenais peu à peu ce qui se passait, j'étais extirper du royaume des morts, quelle genre de maléfice pouvais-ce être? Que me voulait la vie? Après des siècles de loyale servitude, qui pouvait m'imposer pareil châtiment.
Après la douleur mentale vint la douleur physique, le bout du tunnel n'étais plus si loin, je serrai dents et poings, la sensation qui me prenait n'étais pas nouvelle, cette fois c'était certains : Le monde des morts me rejetais, la vie s'emparait à nouveau de moi.
[…]
Le crack sonore qui suivi fut net et harmonieux, je brisais sans difficulté la pierre de ma stèle et fut submerger par le déluge. La pluie battante s'écrasait avec férocité contre ma peau bouillante. Je m'extirpai des décombres difficilement, mes sens encore endormis. J'étais pris de vertiges, cette étrange situation me laissait perplexe.
C'est alors qu'une voix rauque et familière m'extirpa de mes pensées, la confusion me reprenait
-Crois-tu que cela ait marché?
Une sévère migraine me prenait à présent, que pouvais-je bien faire ici? Qu'avait-il pu arriver pour que la meute m'extirpe de mon sommeil? Je n'arrivais pas encore à identifier les êtres en présence, mais mon instinct me disait qu'il y avait plus de 2 présences inconnues. Je tendis l'oreille, et perçus de nouveaux sons.
-Ne le brusque pas, il est probablement encore sous le choc.
-C'est un dur, c'est mon fils.
Fils? De qui parlait-il donc? L'odeur de la mort planait sur cet endroit qui m'était familier. Le sol jonché par les cranes, l'odeur de mort pestilentielle… C'est en ces lieux que la meute avait élu domicile. Notre tanière, elle demeurait telle que dans les fragments de souvenirs qu'il me restait.
L'inconnu s'était approché de moi alors que je divaguais encore dans mes pensées, les ténèbres de la nuit m'empêchaient de distinguer les traits de son visage, mais cet ère, cette posture fier et le torse gonflé me rappelait vaguement une personne qui m'étais cher.
-Comment te sens-tu?
Cette voix, je l'aurais reconnu parmi un million. A travers la tempête elle aurait sonné comme une douce symphonie, bien qu'en réalité elle était bien souvent roque et sévère.
-Père, que fais-je en ces lieux?
Je détournai machinalement la tête de gauche à droite, à la recherche d'indice. Rien, mis à part le calme et les crépitements du feu qui se consumait peu à peu un peu plus loin. Le second être s'approcha à son tour. Je ne mis pas plus longtemps à la reconnaitre qu'il ne m'en fallut pour reconnaitre Coroner. Eve se tenait là, côte à côte avec son frère.
-Alors, pas content de nous revoir l'avorton?
Elle se mit à sourire, plissant légèrement les yeux. Elle avait ce don de me réchauffer le cœur avec de simples gestes de tendresse. Je m'avançais vers elle sans m'en rendre vraiment compte, et m'étreignit avec douceur.
-Tu nous as manqué, jeune sot.
Coroner posa sa main sur mon épaule et tout trois nous profitâmes de ce petit moment de chaleur qui n'appartenait qu'à nous. Après quelques secondes, je me défis de l'étreinte et redevins sérieux.
-Où sont donc les autres? Kodokan, Bardal, Forcas… Je ne ressens pas leur odeur.
Je lançai un blanc, qui ne fut comblé qu'après quelques dizaines de secondes. Et perçut même une larme coulée sur la joue d'Eve. Coroner observait l'horizon le regard dur, le souffle lent. Puis finit enfin par desserrer les dents.
-Ils ont tous été exécutés, sans exception.
Mon cerveau venait à peine de traiter l'information que je sentais déjà la colère bouillir au plus profond de moi. Comme à son habitude mon père était franc et directe. Il ne tournait jamais autour du pot, au risque de blesser parfois même son entourage le plus proche. Mes veines se mirent à gonfler, mon pouls s'accélérer! Le souffle haletant, le front trempé je perdais le contrôle de moi-même, mon corps se mit à trembler, le processus était en marche. Je fermais yeux et luttait de toute mes forces pour ne pas sombrer dans la folie destructrice de la créature qui sommeillait en moi.
-Calme toi Shi, tu n'y peux rien et nous non plus.
-Qui… QUI?!
-Je suis désolé Shiraï je n'ai pas été à la hauteur, je n'ai su protéger les nôtre. Les RATS nous ont tendus un piège, et presque tous y sont restés sauf ton père et moi-même…
Elle était sincère et solennelle. Je ressentais dans sa voix de la culpabilité et de la souffrance, cependant ma raison n'arrivait toujours pas à prendre le dessus sur ma haine.
Je posai genou à terre sous le poids de toute cette colère, et serrais les dents plus fort encore! Les RATS… Plus grande vermine que nos terres aient portée! Je n'imaginais pas une seule seconde comment ces bâtards, traitres et lâches eurent été capables d'une telle chose. Je résistais, mais ce n'était pas suffisant, je me mis à trembler de plus belle.
-Sers t'en.
-Coro arrête.
-Sers t'en !
Mon poing serrais si fort que mes articulations craquèrent une à une bruyamment. Déchirant le ciel d'un hurlement digne des plus féroces lycans je me métamorphosai, laissant place à la véritable bête. Je me mis alors à courir droit devant moi, sans même regarder par-dessus mon épaule et guider par la furie vengeresse dans les ténèbres les plus profonds de la nuit.